HAUTE ROUTE PYRENEES : Ma première victoire
20 > 26 Août 2016

HAUTE-ROUTE-PYRENEES --Laetitia-Roux

« Une semaine toujours aussi intense dans l’effort, en émotions, sensations et dans le partage »

HAUTE-ROUTE-PYRENEES --Laetitia-Roux-départ-J5

La Haute Route est une épreuve que je connais bien puisque j’en suis à ma 5ème participation. Apparemment le temps nécessaire pour dompter cette épreuve. L’aventure humaine, les rencontres, et liens qui se créent au fil des jours avec les coureurs en font une épreuve inoubliable.

L’année passée sur la Haute Route Alps, j’avais déjà intégré beaucoup de choses en terme de gestion et de stratégie. Les courses à étapes, je connaissais déjà notamment avec la Pierra Menta, mais le cyclisme c’est très différent dans le sens où les autres coureurs ont un impact considérable sur ta course.

« Il est impossible de faire la course seul comme en ski alpinisme »

Sur les plats, rouler derrière quelqu’un, « dans sa roue » comme on dit, peut diminuer l’effort de moitié, notamment si il y a du vent de face. Rouler très vite dans la roue de quelqu’un ou en peloton, demande beaucoup de technique et d’attention. C’est un stress permanent car il faut être très vigilant à ce que font les autres autour, mais c’est très intéressant.

Les 2 premiers jours commençaient par cinquante et soixante-dix kilomètres de plat-vallonné.

HAUTE-ROUTE-PYRENEES --Laetitia-Roux- descente-lancets

« C’est très dur pour moi de rester avec les groupes de devant »

HAUTE-ROUTE-PYRENEES --Laetitia-Roux-Etape1

Je ne suis pas très puissante et sur ces terrains c’est la puissance pure qui parle. J’ai du laisser beaucoup d’énergie dès le débuts de ces deux premiers jours pour m’accrocher au maximum. Camille est très solide dans ces conditions, comme beaucoup de triathlètes qui ont l’habitude de rouler très fort et seuls, sur les plats. J’ai tellement du forcer que mes genoux ont commencé à se plaindre et me faire peur. Des douleurs tendineuses se sont faites ressentir…

Le 3ème jours c’était le contre la montre. Beaucoup considèrent ce jour comme le jour de « récupération » car l’épreuve est très courte comparé aux autres jours. Mais lorsqu’on veut donner le meilleur de soi- même, c’est le jour le plus intense… Malgré tout, le contre la montre tombait à pic ! Il m’a permis de laisser un peu de répit à mes genoux fatigués.

Les quatrième et cinquième étapes furent certainement les plus dures pour une majorité des coureurs car il fallait bien chercher pour trouver du plat. L’enchaînement des cols était rude. Surtout que les Pyrénées n’ont pas de pitié pour les cyclistes !

« Les pentes sont très raides et cassantes, tout ce que j’aime ! »

Le quatrième jour fut le test suite à mes douleurs. J’ai rapidement senti que ça irait. J’étais même très bien ! J’avais enfin trouvé mon rythme et le profil me permettait de m’exprimer. L’étape s’est déroulée pour le mieux avec juste quelques tensions mais les douleurs étaient finies.

J’étais très heureuse de partager cette semaine avec Christine, une amie – « co-équipière » australienne, qui s’était réjouie de se joindre à moi pour relever le challenge Haute Route Pyrénées. Je mets co-équipière entre guillemets car le seul moment où nous n’étions pas ensemble c’était lorsque que nous étions sur le vélo… Mais c’est formidable de se retrouver après la course pour manger, parler et rire avec les autres coureurs.

Nous étions tous les soirs ensemble dans les hébergements. Je fais une petite parenthèse pour vous expliquer rapidement cet aspect équipe au sein de la Haute Route. Les équipes comportent de trois à neuf coureurs. Sur chaque étape, le temps des trois meilleurs coureurs de l’équipe sont cumulés. Il y a très peu d’équipe qui fonctionne comme on le voit sur le Tour de France pour aller chercher la gagne. L’esprit est plus détendu 😉

HAUTE-ROUTE-PYRENEES --Laetitia-Roux - montée

« J’avais pour ambition de donner le meilleur de moi même »

HAUTE-ROUTE-PYRENEES --Laetitia-Roux

La gestion d’une course sur sept jours n’est pas la même qu’une course d’un jour… Il faut bien se connaître pour savoir jusqu’où il est possible d’aller dans la douleur sans « se griller » pour les cols, et les jours suivant.

Les sixième et septième étapes me faisaient peur car il y avait à nouveau beaucoup de plat. Soixante kilomètres pour la sixième et quasiment la totalité, mis à part le col de Menté (10km à 9% de pente) pour la septième qui nous amenait jusqu’à Toulouse. Il fallait trouver un bon groupe et serrer les dents !

Je me suis sentie très bien sur le col de Menté mais après avoir basculé, nous n’étions que deux pour attaquer les 80 kilomètres de plat… Dur !

« J’ai serré les dents autant que j’ai pu pour rester avec François »

Le canadien roulait très fort au plat et dans les relances. La route était très sinueuse, j’avais la sensation de faire une séance d’intervalles. A chaque tournant je devais relancer pour « recoller ». Nous avons rattrapé un coureur qui s’est accroché à nous comme il pouvait lui aussi 😉 Puis, ça s’est compliqué car le plat est devenu vallonné.

Les cuisses me brûlaient à chaque bosse où ma respiration et mes battements cardiaques s’intensifiaient pour arriver à rester avec « mon canadien ». L’autre gars, semblait en baver autant que moi pour tenir le rythme. Un gars de son équipe qui suivait en voiture, nous lançait régulièrement : « le groupe de devant n’est pas loin, il faut continuer, vous allez recoller ». Pfiou !!!

HAUTE-ROUTE-PYRENEES --Laetitia-Roux - Mike et Dean des copains rencontres là bas

« Je n’y croyais pas cinq minutes, mais je ne pouvais pas me permettre de me faire lâcher ! »

HAUTE-ROUTE-PYRENEES --Laetitia-Roux- arrivée

Derrière nous, le trou était énorme avant le prochain groupe. Jusqu’au moment où nous avons aperçu le groupe de devant. Oh my God ! Il ne semblait pas loin dans cette montée mais lorsque celle-ci s’est aplanie à nouveau, les cyclistes s’étaient volatilisés ! François appuyait encore et encore pour les apercevoir à nouveau… ça a duré longtemps… et sur cette dernière accélération François à rattrapé le groupe. L’autre cycliste qui suivait difficilement me dépassa pour tenter de faire de même, mais son énergie semblait ne plus suffire ! Je repassait devant lui à mon tour pour tenter ma dernière chance et donnais tout pour les rattraper.

J’ai bien cru que ça ne suffirait pas mais finalement si ! Incroyable ! Nous avions réussi ! Sitôt au sein du peloton, je pouvais soufflé un peu et retrouver mes esprits et mes cuises. Le groupe roulait bien mais l’effort à fournir pour avancer avec eux n’était pas comparable à ce que nous avions du déployer les dizaines de kilomètres précédents pour les rattraper. Je me retrouvais aux côtés de Mike Cotty notamment. Nous étions donc dans le 2ème groupe de la course. Incroyable ! J’étais aux anges !

« Mais il y a eu cette chute dans l’épingle… »

J’ai senti une force qui s’appuyait sur ma roue arrière puis un coureur qui commençait à crier. J’avais beau résister, mon vélo se coucha soudainement et sans comprendre comment je me retrouvais à terre, à côté de François. Le canadien qui m’avait emmené pendant toute cette première partie de course. Je n’ai rien compris, je récupérais mon vélo et remontais dessus au plus vite pour ne pas se faire lâcher par le groupe.

En même temps que je constatais une douleur vive à l’épaule et au genou, je m’apercevais que la manette de vitesses qui contrôle le changement des pignons était cassée. Plus moyen de passer les petits pignons pour accélérer la cadence. J’arrivais malgré tout à recoller le groupe, mais je savais que ça n’allait pas suffire pour faire les derniers quarante kilomètres de plat descendant qu’ils nous restaient à parcourir. Je me suis accrochée quelques kilomètres…

HAUTE-ROUTE-PYRENEES --Laetitia-Roux-arrivée-médaille

« Après ma séance d’intervalles et ma séance de force,
je me retrouvais à faire une séance de vélocité 😉 »

HAUTE-ROUTE-PYRENEES --Laetitia-Roux-Podium femmes

Je ne pouvais plus ! Je m’arrêtais au bord une première fois pour tenter de réparer ou au moins de mettre la chaîne sur le petit pignon mais ça n’était pas suffisant. En single speed (c’est à dire que je ne pouvais plus changer les pignons) ça n’était pas suffisant.

Alors que le groupe était déjà loin, je décidais de me faire prêter un vélo et d’attendre le prochain groupe pour finir la trentaine de kilomètres qui me restait. Le groupe me rattrapa comme prévu, sans filles à l’horizon.

« Je passais cette dernière ligne d’arrivée un peu secouée par la chute, mais extrêmement heureuse de remporter ma première Haute Route ! »

L’aventure était finie ! C’est toujours aussi brutal quand ça s’arrête ! Toute l’émotion et la pression retombaient, et je réalisait doucement que j’avais vécu une nouvelle fois, et survécu aussi, à la « tornade Haute Route ». Aux côté de mon amie Chris, qui se réjouissait chaque jour des paysages et des rencontres qu’elle faisait ; de Pascal, qui m’a gentiment offert sa précieuse assistance mécanique ; Mike qui nous faisait vibrer lors des breafing et sur le vélo ; Renaud et Pierre, les deux Luxembourgeois qui étaient de parfaits co-équipiers, bien qu’un peu trop rapides pour moi, mais qui nous ont abandonnés en cours de route car ils ne faisaient que la course compact  qui ne dure que trois jours ; Arthur, l’anglais en rose avec un air de clown, qui rit toujours et dégage une énergie fabuleuse ; Mumu, qui m’a refait des jambes toutes neuves tous les jours et m’a offert beaucoup de réconfort sur sa table de massage, Nico et Hélène, que je connaissais déjà puis Camille, Laurent, Gilles, Daniel, des nouveaux copains français de Haute Route ; puis tous les autres étrangers dont je ne me rappelle plus les noms mais qui étaient formidables aussi !

« Epic, magique, surprenante, fabuleuse, dure, inoubliable, exigeante, chaleureuse, autant d’adjectifs qui collent avec cette belle semaine »

Merci à toute l’équipe de la Haute Route et les bénévoles de nous permettre de vivre de tels moments

A l’année prochaine et bonne course à tous ceux et celles qui se lanceront sur la Haute Route Alps et la Dolomites Swiss Alps
All the best guys